Shelters for facts— Composite— Sniper Tv
Julien Maire (FR)
Shelters for facts— Composite— Sniper Tv
Installation

En 1977, les studios Eames produisent un court métrage demeuré célèbre Power of Ten. Ce film explore les limites de l’infiniment grand et de l’infiniment petit dans un travelling optique à puissance dix. On peut y observer un couple au bord du lac Michigan duquel les images s’éloignent progressivement vers la galaxie la plus lointaine pour revenir ensuite vertigineusement dans la structure moléculaire de la main de l’homme. Bien avant que les images satellites et microscopiques ne soient banalisées, ce film encyclopédique explore deux des schèmes de la connaissance humaine.

Librement inspiré de ce court métrage, Shelters for fact présente des éléments et figures imprimés en stéréolithographie qui sont directement posés sur des capteurs images de caméras. En jouant sur des rapports d’échelle et en supprimant les effets de perspective, ces micros-sculptures produisent en direct des rayogrammes. Elles sont ensuite vidéo projetées au sein de l’espace d’exposition. La projection monochrome de Shelter for facts se déploie autour de décors élémentaires : mobilier, personnages, immeubles qui semblent en latence au cœur de l’image vidéo. L’installation révèle des images singulières tout à la fois figées et mises en mouvement par des variations de lumière aux pourtours des capteurs.

L’installation Composite s’agrège autour du même protocole mais développe un procédé qui altère plus encore la surface de captation vidéo. Un graveur micrométrique dessine sur des capteurs. En procédant par une altération définitive de la surface sensible du capteur, le graveur numérique implémente de l’immobilité et un infime relief sur la surface numérique de captation. Le graveur poursuit son travail durant la durée de l’exposition produisant ainsi un nombre considérable de dessins. Aux abords de l’installation, se trouve un dispositif composé de plusieurs écrans disposés à la façon d’un cabinet d’amateur. Une fois reconstitué et connecté, ces capteurs bien qu’ayant été définitivement affectés par le procédé redeviennent des caméras fonctionnelles. Celles-ci tout en affichant l’image spectrale et immobile des dessins préalablement engravés filment en outre le spectateur. En injectant de l’immobilité sur la surface de captation, les images obtenues placent de facto le spectateur dans le vif de l’image.

Le dernier volet de cette recherche vidéographique, Snipper tv, réside en une altération qui se veut radicale et définitive. Un trou percé de part en part du capteur pulvérise son électronique matricielle. Ce dernier prend la forme d’une croix noire que le spectateur assimile instinctivement à un viseur de snipper. La caméra ainsi altérée saisit un flux continu et aléatoire d’images d’actualité. Cette incrustation met en abîme un contenu permanent et indifférencié d’images soumises à une violence immanente.

Aux équipes et aux collaborateurs du Fresnoy, à Olivier Gain, Imal Bruxelles et à la promotion Chantal Akerman pour leur soutien.

Julien Maire
Julien Maire France

Julien Maire (né en 1969) travaille depuis le milieu des années 90 au croisement de plusieurs disciplines comme la performance, l'installation média et le cinéma, produisant des œuvres-performances live et hybrides.
Ses œuvres ont été présentées à Transmediale, Ars Electronica, Digital Art Festival, European Media Art Festival, Film Festival Rotterdam, Film Festival Oberhausen, Sonar, ZKM, ICC Tokyo, Empac, Powerstation Shanghai. Julien Maire a été le lauréat de la Biennale Update_2 en 2008 et nominé pour le World Technology Award de New York en 2009; son travail s'est vu distingué par trois mentions d'honneur au Prix Ars Electronica.

Crédit photos / Photo credit
Aurélie Brouet

Production : Le Fresnoy, Studio national des arts contemporains