Vidéo-surveiller : images du contrôle et fictions paranoïaques
Les images sans cameraman (mais cadrées) de la vidéosurveillance appartiennent à notre quotidien, et pourtant, sauf à être lui-même un agent de sécurité préposé aux écrans de contrôle, le spectateur-citoyen ne les voit... qu'au cinéma. Outils de contrôle et de "preuve", dans les espaces publics comme dans les espaces clos des expériences de laboratoire, des hôtels ou des prisons, les caméras fixes ou "balayantes" de la vidéo-surveillance semblent sorties du champ social (institutionnel, policier, scientifique) auquel elles appartiennent pour jouer le rôle banalisé/banalisant de préposés à une "sécurité" dont nous savons bien peu. Leurs images ne nous sont familières que sous leur forme visible au cinéma : faible définition et couleurs baveuses ou distordues, plongées du plafond ou angles déformés des couloirs, grand angle des places et rues. C'est ainsi qu'elles figurent dans les scénarios, c'est ainsi aussi (et pour cela même) qu'elles sont objets de montages et usages critiques de la part d'artistes intrigués par leur texture, leur cadrage, la circulation des êtres dans des espaces étrangers au regard. Et inquiets, souvent, de leur usage et du monde qu'elles dessinent et désignent : celui du voyeurisme et de l'intrusion..
Bientôt rejointe par l'image-satellite, l'image-drone et l'image-webcam, l'image de surveillance est le registre même du corollaire du contrôle : la vision paranoïaque du monde. On proposera ainsi de (re)voir quelques-uns des essais les plus réussis d'artistes contemporains, et de continuer la réflexion sur la nature (semblerait-il) forcément paranoïaque des fictions que ces images suscitent.
Elle a également travaillé pour Pathé Télévisions en tant que productrice, et à l’unité Documentaires d'ARTE. Elle écrit notamment pour les revues Trafic et MUBI Notebook.
Elle enseigne le cinéma dans plusieurs écoles de cinéma (dont la FEMIS) et universités européennes et traduit des films chinois, italiens et anglophones.